Les mères fument pendant la grossesse, le cerveau des bébés trinque

Les mères fument pendant la grossesse, le cerveau des bébés trinque

L’exposition in utero au tabagisme maternel a été associée à des troubles cognitifs et comportementaux au cours de l’enfance et de l’adolescence. Une étude prospective menée sur des enfants âgés de 6 à 8 ans conforte l’hypothèse selon laquelle ces conséquences délétères du tabac pourraient être liées à un impact sur le développement cérébral.

Deux cent vingt six enfants ont été recrutés dans la population de la Generation R Study, une étude prospective de cohorte de naissance réalisée aux Pays-Bas. La moitié d’entre eux ont été exposés au tabac pendant la vie fœtale, soit au début de la grossesse (mères ayant arrêté de fumer dès la connaissance de leur état), soit tout au long de celle-ci. Des enfants non exposés, en nombre égal, ont servi de contrôles. Le recueil des informations sur le tabagisme maternel s’est fait de façon prospective et les enfants ont bénéficié d’une IRM cérébrale entre 6 et 8 ans, et d’une évaluation comportementale et émotionnelle avec la Child Behavior Checklist, et d’une mesure du quotient intellectuel (QI) non verbal à 6 ans.

L’analyse des résultats a mis en évidence des différences significatives en fonction de l’exposition ou non au tabac avant la naissance. Par rapport aux contrôles, les enfants exposés durant toute la grossesse sont nés avec un plus petit poids de naissance (3 194 ± 536 g versus 3 475 ± 520 g ; p = 0,001). Après ajustement pour toutes les variables confondantes, ils présentent des particularités en termes de morphologie cérébrale : d’une part, un volume cérébral total et un volume de la substance grise plus faibles (-62,6 cm3 et -43,7 cm3 ; intervalle de confiance à 95 % [IC95] de 102,4 à -22,7 et -71,4 à -15,9 ; p  = 0,002) ; d’autre part, une moindre épaisseur corticale, en particulier au niveau des régions frontale supérieure (-0,08 mm2 ; IC95 de -0,15 à -0 ;  p = 0,02), pariétale supérieure (-0,06 mm2 ; IC95 de -0,11 à -0,02 ;  p = 0,007), occipitale latérale (-0,04 mm2 ; IC95 de -0,09 à -0,01 ;  p = 0,04) et précentrale (-0,07 mm2 ; IC95 de -0,12 à -0,02 ;  p = 0,009). Enfin, l’étude révèle l’existence d’une association directe entre les problèmes affectifs et l’épaisseur du cortex précentral (p = 0,004) et du cortex frontal supérieur (p = 0,004).  Les auteurs soulignent que les cerveaux des enfants nés de mères ayant arrêté de fumer pendant la grossesse étaient comparables à ceux des contrôles non exposés (volume du cerveau et épaisseur corticale).

Ces données ainsi que celles des autres études concernant les effets à long terme de l’exposition anténatale au tabac sur le développement cérébral renforcent la nécessité de prévenir ou de réduire la consommation tabagique pendant la grossesse. Des recherches supplémentaires utilisant en particulier l’imagerie en tenseur de diffusion et l’IRM fonctionnelle permettraient de mieux connaître les effets neurodéveloppementaux du tabagisme in utero.

Références :
El Marroun H et coll. : Prenatal tobacco exposure and brain morphology: a prospective study in young children. Neuropsychopharmacology. 2014 ; 39 : 792-800.

source : www.jim.fr